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Une Proposition de résolution européenne pour une réglementation européenne sur la gestion du trafic spatial et au développement d’un espace « vert »,a été déposée au Sénat.
Selon l’auteur du texte, Ludovic HAYE, longtemps resté vierge de toute intervention terrestre, l’espace extra-atmosphérique a connu dès la seconde moitié du XXe siècle de brutales incursions d’origine humaine.
Au fil du temps, celles-ci se sont banalisées, laissant derrière elles des débris de plus en plus nombreux. Depuis le début de la course à l’espace, quelque 6 500 lancements ont mis en orbite 16 990 satellites, dont près de 9 000 sont actuellement opérationnels.
L’Agence spatiale européenne (ESA) dénombre ainsi un million d’objets d’origine humaine en rotation autour de la Terre, pour s’en tenir aux seuls débris dont la taille est supérieure à un centimètre.
Les risques causés par ces objets doivent désormais être pris en considération par tous les acteurs de l’espace. Dans la continuité de la note scientifique n°44 de l’OPECST1(*) traitant la question des débris spatiaux – rédigée par le sénateur Ludovic HAYE et le député Jean-Luc FUGIT – cette proposition de résolution européenne vise à identifier les actions concrètes à mettre en oeuvre le plus rapidement possible à l’échelle européenne afin de se prémunir de la pollution spatiale et surtout des risques qu’elle comporte.
Les 3 enjeux prioritaires sont :
Les défis liés à la gestion du trafic spatial et à l’occupation des orbites ont été largement négligés. La situation actuelle reflète une loi du plus fort où les premiers arrivés sont les premiers servis. Il semble nécessaire de mettre en place un cadre réglementaire international, sous le contrôle de l’ONU, pour éviter une course effrénée à l’espace menée au détriment de la protection de l’environnement spatial. La gestion du trafic spatial repose sur deux piliers : d’une part, la définition de règles communes, d’autre part, l’application et le contrôle du respect de ces règles, qui suppose de se doter de capacités de surveillance.
En ce qui concerne les règles communes, deux points paraissent importants.
Tout d’abord, le futur texte européen doit répondre aux problèmes de sécurité et de durabilité des activités en orbite. Ensuite, il doit favoriser la compétitivité de notre industrie spatiale. En effet, les entreprises françaises étant soumises à la loi relative aux opérations spatiales (LOS), il est fondamental d’étendre ce cadre légal aux acteurs européens et aux acteurs internationaux évoluant sur le territoire européen, afin de mettre tous les compétiteurs sur un pied d’égalité.
Les débris proviennent aujourd’hui principalement des objets relâchés dans l’espace au cours de missions spatiales ; toutefois, les scientifiques estiment qu’avec la massification des envois de satellites, la première source de débris sera bientôt produite par les collisions, qui se produisent à des vitesses très élevées (entre 25 000 et 57 000 km/h).
Un scientifique de la NASA, Donald J. Kessler, a même conjectureì un scénario de « réaction en chaîne » ouÌ la quantité de débris et le nombre de collisions évolueraient de concert sur un mode exponentiel.
Ce scénario, appelé « syndrome de Kessler » pourrait devenir réalité rapidement si aucune action concrète n’était entreprise. Ces débris forment un danger bien réel mais sous-estimé. Certains d’entre eux pourraient endommager voire détruire n’importe quel satellite ou vaisseau qu’ils percuteraient.
Il est également important de noter que les objets en orbite basse finissent par retomber sur Terre, car l’atmosphère, même très peu dense à haute altitude, les freine et les fait descendre en spirale. Or, ils ne brûlent pas complètement au cours de ce processus : entre 10 % et 40 % de leur masse survit à la rentrée et s’écrase à la surface du globe.
De plus, pour certains débris, une élimination naturelle par retombée dans l’atmosphère peut prendre des siècles.
Un certain nombre de solutions s’offrent à nous afin d’anticiper et de réduire les risques :
– la surveillance des débris avec le programme européen CAESAR, qui analyse les informations disponibles sur les rapprochements en orbite, évalue le niveau de risque et alerte quand le niveau de risque de collision dépasse le seuil défini (0,05 %). Il peut également valider les actions d’évitement ;
– les mesures de protection des satellites, qui peuvent être passives, par blindage, ou actives, par désorbitage préventif ;
– le traitement actif des débris spatiaux, en agissant sur les plus gros d’entre eux.
L’importance d’un espace « vert » (green space) et dépollué ne doit pas être sous-estimée. En réduisant les débris spatiaux, nous assurons la sécurité de nos prochains programmes spatiaux.
Dans ce contexte, la collaboration entre les États devient cruciale. Les débris représentent une menace pour tous les acteurs du monde spatial, quelle que soit leur provenance. Il est dans l’intérêt de tous de limiter la pollution de l’espace extra-atmosphérique.
Cette pollution spatiale n’est pas exclusivement constituée de débris dangereux, car ce terme englobe également la pollution des ondes radio, la pollution lumineuse pour l’observation, les quantités d’ergol embarqué…
La coopération internationale, en lien avec les prérogatives de l’ONU, est essentielle pour garantir que l’espace reste un domaine accessible et sécurisé, permettant ainsi de poursuivre l’exploration et l’innovation. Le développement européen des technologies spatiales est une condition nécessaire de notre capacité à maintenir un espace dépollué. Le 13 octobre 2024, SpaceX a réussi l’exploit de capturer en vol le premier étage de la fusée Starship grâce à son pas de tir « Mechazilla ».
Cette prouesse marque une avancée significative dans la réutilisation des fusées super-lourdes, ouvrant la voie à une nouvelle ère de recyclage dans les technologies spatiales. Notre capacité de récupérer les corps spatiaux – notamment les fusées et les satellites – nous permettra de mieux préserver l’espace des activités humaines. C’est le sens de la mission ClearSpace-1 de l’ESA pour 2026. L’ambition de cette mission est de capturer et ramener en toute sécurité un débris de 112 kg grâce à un bras robotique.
La conservation de l’espace passe également par une sobriété by design des technologies spatiales ainsi que par une meilleure intégration de l’intelligence artificielle à des fins de protection de l’environnement spatial, notamment en lien avec l’enjeu de réduction des quantités d’ergol embarquées ou de développement d’un ergol moins polluant.
En cohérence avec les trois enjeux prioritaires présentés, le Sénat appelle la Commission européenne à faire de l’espace une priorité de son mandat 2024-2029. Il rappelle à ce titre la nécessité de prendre en compte les problématiques de développement durable et de sécurité, desquels le développement spatial ne pourra s’extraire.
* 1 Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques.