Faire écarter une clause attributive de compétence territoriale

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La clause attributive de compétence territoriale, stipulée dans le contrat de location financière, est inconciliable avec la relation d’interdépendance qui caractérise l’opération d’ensemble, car son application reviendrait à faire juger séparément un litige qui concerne de manière globale deux contrats liés et les trois parties en cause.

Pour rappel, l’article 42 code de procédure civile énonce : ‘La juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur.

S’il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l’un d’eux.’

L’article 48 du code de procédure civile dispose : ‘Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.’

La solution juridique apportée à cette affaire est la suivante :

1. La nullité du jugement est rejetée, car la SASU One bureautique n’avait pas constitué avocat en première instance, ce qui l’empêche d’invoquer la violation du principe de la contradiction.

2. L’exception d’incompétence territoriale est rejetée, car les contrats litigieux sont interdépendants, ce qui justifie l’écarter la clause attributive de compétence territoriale et confirmer la compétence du tribunal de commerce de Caen.

3. L’évocation du litige entre M. [M] et la société NBB Lease France 1 est décidée pour donner une solution définitive au litige.

4. Les prétentions nouvelles de M. [M] contre la société NBB Lease France 1 sont recevables.

5. La résolution du contrat conclu entre M. [M] et la SASU One bureautique est confirmée en raison de l’inexécution grave des obligations contractuelles de cette dernière.

6. La caducité du contrat de location financière avec la société NBB Lease France 1 est prononcée en raison de l’interdépendance des contrats.

7. Les restitutions et les dommages et intérêts sont accordés à M. [M], notamment le remboursement des loyers payés après la résolution du contrat et une indemnité de 3.000 euros pour le préjudice subi.

8. Les autres demandes relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées, avec condamnation de la SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 aux dépens et au paiement de frais irrépétibles à M. [M].


Résumé

L’indivisibilité contractuelle

Les prestations contractuelles de la SASU One bureautique de création de site internet, de maintenance et de fourniture de matériel informatique, ont été proposées et fournies de manière indissociable.

Le fait que la location financière ne vise que le financement du matériel PC Lenovo, à l’exclusion des autres prestations de la SASU One bureautique, n’est pas de nature à exclure l’interdépendance entre les conventions.

Au vu de ces éléments, la cour retient que les deux contrats souscrits par l’appelant sont interdépendants.

Pour rappel, il est de principe que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants.

Si la réalité de l’interdépendance est acquise à leur formation, automatiquement, quelles que soient les circonstances, l’anéantissement de l’un entraîne la caducité de l’autre, la caducité n’intervenant toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble.

Référencement naturel de site

Pour établir la défaillance de la SASU One bureautique à ce titre, M. [M] produit notamment:

– un procès-verbal de constat de huissier établi le 8 avril 2021 qui montre que certaines photos présentes sur le site créé pour Sani services ne présentent pas d’intitulé, ce qui n’est pas de nature à faciliter le bon référencement du site ;

– des résultats de recherche Google avec des mots-clés tels que ‘toilette location [Localité 6]’ qui ne positionnent pas favorablement le site Sani-services.fr (n’apparaît pas en première page);

– un document qui compare le nombre de visites sur l’année 2020 entre le site créé par One bureautique et l’ancien site Saniservices.pro mis en place par la société Jalis et qui met en évidence 1156 visites pour le premier contre 3756 visites en moyenne pour le second.

Il ressort de ces éléments une fréquentation du site créé par la SASU One bureautique nettement inférieure à celle de l’ancien site internet Jalis et donc une forte baisse de la visibilité de l’entreprise de M. [M] sur le moteur de recherche.

La société One bureautique n’a pas amélioré le référencement naturel du site Sani-services qui s’est même révélé moins efficace.

Le fait pour M. [M] de ne pas avoir opté pour un référencement payant, basé sur une campagne publicitaire, n’est pas de nature à exonérer la société One bureautique de son obligation de rendre l’entreprise visible de façon naturelle grâce à un travail de construction approfondi et notamment à un choix de mots-clés pertinent.

L’inexécution contractuelle de la prestataire est ainsi démontrée. Elle a persisté malgré la mise en demeure. Elle présente un caractère suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs allégués.

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 2224 du code civil indique: ‘La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.’

L’article 1226 du code civil énonce: ‘Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.

La mise en demeure mentionne expressément qu’à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Lorsque l’inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l’inexécution.’

L’article 1228 ajoute: ‘Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.’

L’article 1209 du code civil dispose :

‘La résolution met fin au contrat.

La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice.

Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.’

L’article 1187 du même code prévoit : ‘La caducité met fin au contrat.

Elle peut donner lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.’

L’article 1352 du même code énonce : ‘La restitution d’une chose autre que d’une somme d’argent a lieu en nature ou, lorsque cela est impossible, en valeur, estimée au jour de la restitution.’

Propriété du nom de domaine

En l’espèce, sur la demande de M. [M] visant à la communication des informations nécessaires à la restitution et l’exploitation du nom de domaine sani-services.fr, il convient d’observer que le contrat passé avec la société One bureautique stipule expressément que le client devient propriétaire du tout (nom du domaine, adresse mail…) à la fin du contrat, cette précision étant rappelée une seconde fois, soulignée en rouge, au chapitre 4.1 de la proposition commerciale signée par M. [M] (cf sa pièce n°1).

Il en résulte que la société One bureautique demeure propriétaire du nom du site pendant toute la durée de du contrat, aucun manquement ne pouvant lui être reproché à cet égard.

M. [M] ayant résilié le contrat unilatéralement avant son terme, n’est pas fondé à obtenir les codes nécessaires à la restitution du domaine.

Sa demande présentée de ce chef est donc rejetée.

Sur la nullité du jugement

La SASU One bureautique soulève la nullité du jugement pour violation du principe de la contradiction, mais sa demande est rejetée car elle n’avait pas constitué avocat en première instance.

Sur l’exception d’incompétence et l’interdépendance des contrats

Les contrats litigieux sont interdépendants, ce qui justifie l’éviction de la clause attributive de compétence territoriale. Le tribunal de commerce de Caen est compétent pour l’affaire.

Sur l’évocation

La cour d’appel de Caen évoque le litige opposant M. [M] et la société NBB Lease France 1 pour une solution définitive.

Sur la recevabilité des prétentions nouvelles

Les demandes de M. [M] sont jugées recevables en appel.

Sur la résolution du contrat

La résolution du contrat entre M. [M] et la SASU One bureautique est confirmée en raison de l’inexécution des obligations contractuelles de cette dernière.

Sur la caducité du contrat de location financière

Le contrat de location financière est déclaré caduc en raison de son interdépendance avec les autres contrats.

Sur les restitutions et les dommages et intérêts

Les parties sont condamnées à des restitutions et des dommages et intérêts en lien avec la résolution et la caducité des contrats.

Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées, et les demandes de la SASU One bureautique et de la société NBB Lease France 1 sont rejetées.

– M. [R] [M] : 3.780 euros à titre de restitution des loyers
– M. [R] [M] : 2.500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel
– SASU One bureautique et société NBB Lease France 1 : 3.780 euros à titre de restitution des loyers
– SASU One bureautique et société NBB Lease France 1 : 2.500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel
– SASU One bureautique et société NBB Lease France 1 : dépens de l’appel


Réglementation applicable

– Article 16 du code de procédure civile
– Article 42 du code de procédure civile
– Article 48 du code de procédure civile
– Article 1186 du code civil
– Article 88 du code de procédure civile
– Article 1103 du code civil
– Article 2224 du code civil
– Article 1226 du code civil
– Article 1228 du code civil
– Article 1209 du code civil
– Article 1187 du code civil
– Article 1352 du code civil
– Article 700 du code de procédure civile

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Dorian SAINT-LÉGER, avocat au barreau de CAEN
– Me Mickaël DARTOIS, avocat au barreau de CAEN
– Me Thomas DUGARD, avocat au barreau de ROUEN
– Me Marlène DESOUCHES-EDET, avocat au barreau de CAEN
– Me Carolina CUTURI-ORTEGA, avocat au barreau de BORDEAUX

Mots clefs associés

– Nullité du jugement
– Principe de la contradiction
– Exception d’incompétence
– Interdépendance des contrats
– Caducité du contrat
– Evocation
– Recevabilité des prétentions nouvelles
– Résolution du contrat
– Notification de résolution
– Caducité du contrat de location financière
– Restitutions
– Dommages et intérêts
– Réparation du préjudice
– Dépens et frais irrépétibles

#ERROR!

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

AFFAIRE :N° RG 22/01258

 

ARRÊT N°

NLG

ORIGINE : DECISION en date du 30 Mars 2022 du Tribunal de Commerce de CAEN

RG n° 2022000259

COUR D’APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 04 AVRIL 2024

APPELANTE :

S.A.S.U. ONE BUREAUTIQUE

N° SIRET : 824 648 331

[Adresse 1]

[Localité 3]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée et assistée de Me Dorian SAINT-LÉGER, avocat au barreau de CAEN

INTIMES :

Monsieur [R] [O] [W] [M] exerçant sous le nom commercial A SANI SERVICES

N° SIRET : 378 223 473

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représenté par Me Mickaël DARTOIS, avocat au barreau de CAEN,

Assisté de Me Thomas DUGARD, avocat au barreau de ROUEN

S.A.S. NBB LEASE FRANCE 1

N° SIRET : 814 630 612

[Adresse 2]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Marlène DESOUCHES-EDET, avocat au barreau de CAEN,

Assistée de Me Carolina CUTURI-ORTEGA, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

DÉBATS : A l’audience publique du 11 janvier 2024

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

ARRET prononcé publiquement le 04 Avril 2024 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, initialement fixée au 07 Mars 2024 puis au 21 Mars 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

*

* *

M. [R] [M], commerçant spécialisé dans la location de sanitaires mobiles exerçant son activité sous le nom commercial Sani services, disposait d’un site internet ‘ww.saniservices.pro’, mis en place par la SAS Jalis invest, dont il souhaitait changer le nom de domaine en ‘www.sani-services.fr’.

Le 19 février 2018, la SASU One bureautique, société spécialisée dans la vente et la location de photocopieurs et imprimantes, standards téléphoniques et sites internet a adressé à M. [M] une proposition commerciale portant sur un ‘Pack site Responsive Design’ pour la création d’un site internet + Pack référencement naturel local, incluant un PC portable, moyennant un prix de location avec maintenance sur 5 ans de 180 euros HT par mois. Les frais de création de site et de mise en service d’un montant de 1.600 euros HT étaient offerts pour toute commande engagée avant le 28 février 2018.

Le 28 février 2018, M. [M] a signé ce devis ainsi qu’un bon de commande auprès de la société One bureautique pour la fourniture et la location d’un PC Lenovo et d’un site web de sept pages + référencement naturel régional avec le nom de domaine ‘sani-services.fr’, sur une durée de 5 ans, moyennant un loyer de 180 euros HT avec une périodicité trimestrielle, les deux premières années étant remboursées.

Pour financer l’utilisation du matériel PC, M. [M] a souscrit auprès de la société NBB Lease France 1 un contrat de location financière, moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels d’un montant de 540 euros HT, soit 648 euros TTC.

Le 28 mars 2018, M. [M] et la SASU One bureautique ont signé un procès-verbal de livraison-réception du PC loué, les loyers étant par la suite prélevés conformément à l’échéancier de facturation.

Estimant que le nouveau site mis en ligne en juin 2019 ne correspondait pas totalement à ses demandes s’agissant notamment des photos et du référencement, M. [M] a, par lettre recommandée avec avis de réception du 14 février 2020, mis en demeure la société One bureautique de procéder aux modifications sollicitées, sous peine de prononcer la résolution du contrat pour inexécution.

Le 8 avril 2021, M. [M] a fait constater par constat d’huissier les manquements reprochés à la société One bureautique.

Par actes d’huissier de justice des 11 et 12 janvier 2022, M. [M] a assigné les sociétés One bureautique et NBB Lease France 1 devant le tribunal de commerce de Caen aux fins de voir constater la résolution du contrat portant sur la prestation de site internet et d’ordonner les restitutions qui en découlent, outre la caducité du contrat NBB Lease du fait de l’interdépendance des contrats.

Par jugement réputé contradictoire du 30 mars 2022, le tribunal de commerce de Caen :

– s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris concernant le litige opposant M. [R] [M] à la société NBB Lease France I ;

– a renvoyé l’affaire opposant M. [R] [M] à la société NBB Lease France 1 devant ladite juridiction, dès expiration du délai d’appel ;

– a constaté la résolution du contrat signé le 28 février 2018 entre la société One Bureautique et M. [R] [M], exerçant sous le nom commercial Sani services, avec effet au 17 mai 2021 ;

– a débouté M. [R] [M] de sa demande en paiement de la somme de 2.772,82 euros par la société One bureautique au titre du contrat résolu ;

– a condamné la société One bureautique à payer à M. [R] [M] la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– a ordonné l’exécution provisoire ;

– a condamné la société One bureautique à payer à M. [R] [M] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– a condamné la société One bureautique aux entiers dépens, y compris les frais de greffe s’élevant à la somme de 20,91 euros dont TVA 126,40 euros.

Par déclaration du 19 mai 2022, la SASU One bureautique a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions déposées le 9 février 2023, la SASU One bureautique demande à la cour de :

– Annuler le jugement entrepris en ce qu’il s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris, concernant le litige opposant M. [M] à la société NBB Lease France 1,

– Renvoyer les parties ainsi qu’elles s’en aviseront,

– Condamner M. [R] [M] aux entiers dépens,

Subsidiairement,

– Infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

– Evoquer le litige opposant M. [M] à la société NBB Lease France 1,

– Débouter M. [R] [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la SAS One bureautique,

– Condamner M. [R] [M] à verser à la SAS One bureautique la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par dernières conclusions déposées le 6 décembre 2023, M. [M] demande à la cour de :

– Recevoir M. [M] [R] exerçant sous le nom commercial A Sani services dans l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions, ainsi que dans son appel incident, et le déclarer bien fondé,

– Débouter la société SAS One bureautique de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires.

– Débouter la société SAS NBB Lease France 1 de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires.

– Confirmer partiellement le jugement en date du 30 mars 2022 rendu par le tribunal de commerce de Caen en ce qu’il a :

*constaté la résolution du contrat signé le 28/02/2018 entre la société SAS One bureautique et M. [R] [M], exerçant sous le nom commercial Sani services, avec effet au 17 mai 2021 ;

* ordonné l’exécution provisoire ;

* condamné la société SAS One bureautique à payer à M. [R] [M] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société SAS One bureautique aux entiers dépens, y compris les frais de greffe,

– Infirmer et réformer partiellement le jugement entrepris en ce qu’il :

* s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris concernant le litige opposant M. [R] [M] à la société SAS NBB Lease France 1 ;

* a renvoyé l’affaire opposant M. [R] [M] à la société SAS NBB Lease France 1 devant ladite juridiction, dès expiration du délai d’appel ;

* débouté M. [R] [M] de sa demande en paiement de la somme de 2.772,28 euros par la société SAS One bureautique au titre du contrat résolu

* a limité le montant de la condamnation de la société SAS One bureautique à payer à M. [R] [M] la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau sur ces dispositions,

– Evoquer le litige opposant M. [M] à la société SAS NBB Lease et se déclarer par voie de conséquence compétente,

– Prononcer la caducité du contrat liant M. [M] à la société SAS NBB Lease, au jour de la résolution du contrat liant M. [M] à la société SAS One bureautique,

– A défaut de voir constater la résolution par voie de notification intervenue le 17 mai 2021, prononcer la résolution judiciaire du contrat liant M. [M] à la société SAS One bureautique,

– Condamner in solidum la société SAS NBB Lease France 1 et la société SAS One bureautique à régler à M. [M] [R] exerçant sous le nom commercial A Sani Services la somme de 6.012,28 euros, correspondant aux échéances mensuelles versées à ce jour au titre du contrat conclu avec la société SAS NBB Lease, en tenant compte des remboursements déjà intervenus par One bureautique, ou à défaut la somme de 10.872,28 euros, sauf à parfaire des échéances postérieures qui seront réglées jusqu’à l’arrêt à intervenir,

– Enjoindre à SASU One bureautique de communiquer toutes les informations et codes nécessaires à la restitution et l’exploitation du nom de domaine sani-services.fr, et ce, sous astreinte de 150 euros par jour se décomptant à compter du 10ème jour après la décision à intervenir,

– Condamner la société One bureautique à garantir M. [M] [R] de l’ensemble des condamnations qui pourraient être mises à sa charge au profit de la société NBB Lease France 1,

– Ordonner au besoin la compensation entre les dettes et créances réciproques des différentes parties,

– Condamner la société One bureautique à verser à M. [M] [R] la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant également,

– Condamner in solidum la SAS NBB Lease France 1 et la SAS One bureautique à verser à M. [M] [R] exerçant sous le nom commercial A Sani services la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,

– Condamner in solidum la SAS NBB Lease France 1 et la SASU One bureautique, aux entiers dépens d’appel.

Par dernières conclusions déposées le 9 février 2023, la société NBB Lease France 1 demande à la cour de :

A titre principal,

– Confirmer le jugement entrepris en ce que le tribunal de commerce de Caen s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris,

– Renvoyer l’affaire opposant la société NBB Lease France 1 à M. [R] [M] exerçant sous le nom commercial A Sani services devant le tribunal de commerce de Paris dans le cadre de la procédure actuellement pendante sous le n° RG 2022-040206,

– Débouter la société One bureautique de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– Débouter M. [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire, si la cour infirmait le jugement déféré en ce que le tribunal de commerce de Caen s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris,

– Rejeter la demande de M. [M] tendant à voir la cour évoquer le litige l’opposant à la société NBB Lease France 1,

– Renvoyer ledit litige devant la juridiction de premier degré que la cour estimera compétente,

A titre plus subsidiaire, si la cour faisait droit à la demande d’évocation de M. [M],

– Déclarer M. [M] irrecevable en ses demandes tendant à voir ‘prononcer la caducité du contrat liant M. [M] à la SAS NBB Lease, au jour de la résolution du contrat liant M. [M] à la société SAS One bureautique’ et à voir condamner la société NBB Lease France 1 au paiement de ‘la somme de 5.472,28 euros, correspondant aux échéances mensuelles versées à ce jour au titre du contrat conclu avec la société SAS NBB Lease, en tenant compte des remboursements déjà intervenus, ou à défaut à la somme de 10.332,28 euros, sauf à parfaire des échéances postérieures qui seront réglées jusqu’à l’arrêt à intervenir’, dès lors qu’il s’agit de prétentions nouvelles formulées devant la cour,

– Débouter M. [M] de ses prétentions tendant à voir ‘prononcer la caducité du contrat liant M. [M] à la SAS NBB Lease, au jour de la résolution du contrat liant M. [M] à la société SAS One bureautique’ et à voir condamner la société NBB Lease France 1 au paiement de ‘la somme de 5.472,28 euros, correspondant aux échéances mensuelles versées à ce jour au titre du contrat conclu avec la société SAS NBB Lease, en tenant compte des remboursements déjà intervenus, ou à défaut à la somme de 10.332,28 euros, sauf à parfaire des échéances postérieures qui seront réglées jusqu’à l’arrêt à intervenir’, dès lors qu’il s’agit de prétentions nouvelles formulées devant la cour,

– Débouter M. [M] de l’intégralité de ses prétentions,

A titre très subsidiaire, si la cour prononçait la caducité du contrat de location,

– Ordonner à M. [M] de restituer à ses frais le matériel objet du contrat de location en bon état d’entretien et de fonctionnement, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, exclusivement à la société NBB Lease France 1 au lieu choisi par cette dernière, ou à toute personne désignée par la société NBB Lease France 1,

Dans l’hypothèse où M. [M] ne restituerait pas le matériel objet du contrat de location,

– Autoriser la société NBB Lease France 1 ou toute personne que la société NBB Lease France 1 se réserve le droit de désigner, à appréhender le matériel objet du contrat de location en quelque lieu qu’il se trouve pour en prendre possession en ses lieux et place, les frais d’enlèvement et de transport incombant exclusivement à M. [M],

– Débouter M. [M] de toute demande de restitution des loyers, et, à défaut, condamner M. [M] au paiement à NBB Lease France 1 d’une somme équivalente aux loyers restitués, au titre de l’indemnité de jouissance du matériel mis à sa disposition,

– Ordonner la compensation des sommes qui pourraient être dues entre M. [M] et la société NBB Lease France 1 au titre du présent arrêt,

En tout état de cause :

– Débouter la société One bureautique de l’ensemble de ses prétentions ;

– Débouter M. [M] de l’ensemble de ses prétentions ;

– Condamner M. [R] [M] exerçant sous le nom commercial A Sani-services et la société One bureautique à verser, chacun, à la société NBB Lease France 1 la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner M. [R] [M] exerçant sous le nom commercial A Sani-services et la société One bureautique aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 décembre 2023.

Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS

I. Sur la nullité du jugement

Selon l’article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

La SASU One bureautique soulève, au visa de cet texte, la nullité de la disposition du jugement qui déclaré le tribunal de commerce de Caen incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris dans le litige opposant M. [M] et la société NBB Lease France 1, pour violation du principe de la contradiction, au motif que le tribunal a soulevé d’office cette exception d’incompétence territoriale sans inviter les parties à présenter leurs observations.

Cependant, la SASU One bureautique qui n’avait pas constitué avocat en première instance, alors qu’elle avait été régulièrement citée à personne, n’est pas fondée à invoquer la nullité du jugement pour violation du principe de la contradiction.

Il convient en conséquence de la débouter de cette demande.

II. Sur l’exception d’incompétence et l’interdépendance des contrats

L’article 42 code de procédure civile énonce : ‘La juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur.

S’il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l’un d’eux.’

L’article 48 du code de procédure civile dispose : ‘Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.’

L’article 1186 du code civil prévoit :

‘Un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît.

Lorsque l’exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d’une même opération et que l’un d’eux disparaît, sont caducs les contrats dont l’exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l’exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d’une partie.

La caducité n’intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ ensemble lorsqu’il a donné son consentement.’

En l’espèce, le tribunal s’est déclaré territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris en se fondant sur la clause attributive de compétence territoriale stipulée dans le contrat de location financière conclue entre Monsieur [M] et la société NBB Lease France 1.

Monsieur [M] et la SASU One bureautique concluent à l’infirmation de ce chef en faisant valoir que les deux contrats litigieux sont interdépendants et qu’il est dans l’intérêt d’une bonne justice de statuer sur l’ensemble du litige dans le cadre d’une seule instance.

Leur demande tend ainsi à voir écarter la clause attributive de compétence.

Il est de principe que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants.

Si la réalité de l’interdépendance est acquise à leur formation, automatiquement, quelles que soient les circonstances, l’anéantissement de l’un entraîne la caducité de l’autre, la caducité n’intervenant toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble.

En l’espèce, M. [M] a conclu :

– avec la SASU One bureautique, un contrat de prestation de services (création d’un site Web et maintenance) et de fourniture d’un PC portable Lenovo, sur une durée de 5 ans, moyennant pour l’ensemble un loyer mensuel de 180 euros HT par mois (soit 540 euros HT par trimestre),

– avec la société NBB Lease France 1, un contrat de location financière destiné à financer l’utilisation du matériel PC susvisé, moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels d’un montant de 540 euros HT.

Les contrats en cause, souscrits concomitamment et ayant pour but la mise à disposition de M. [M] d’un outil informatique, forment un tout indivisible et s’inscrivent dans une opération d’ensemble comportant une location financière.

Les prestations contractuelles de la SASU One bureautique de création de site internet, de maintenance et de fourniture de matériel informatique, ont été proposées et fournies de manière indissociable.

Le fait que la location financière ne vise que le financement du matériel PC Lenovo, à l’exclusion des autres prestations de la SASU One bureautique, n’est pas de nature à exclure l’interdépendance entre les conventions.

Au vu de ces éléments, la cour retient que les deux contrats souscrits par l’appelant sont interdépendants.

La clause attributive de compétence territoriale, stipulée dans le contrat de location financière, est inconciliable avec la relation d’interdépendance qui caractérise l’opération d’ensemble, car son application reviendrait à faire juger séparément un litige qui concerne de manière globale deux contrats liés et les trois parties en cause.

Il convient donc d’écarter cette clause dérogatoire et de rejeter l’exception d’incompétence soulevée concernant le litige entre M. [M] et la société NBB Lease France 1, le jugement étant infirmé de ce chef.

La SASU One bureautique ayant son siège à Mondeville (14), le tribunal de commerce de Caen est bien compétent pour connaître de l’affaire.

* Sur l’évocation

Selon l’article 88 du code de procédure civile, lorsque la cour est juridiction d’appel relativement à la juridiction qu’elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne justice de donner à l’affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d’instruction.

En l’espèce, la cour d’appel de Caen est juridiction d’appel relativement au tribunal de commerce de Caen qu’elle estime compétent.

Par ailleurs, il est de l’intérêt d’une bonne justice de juger de manière définitive le litige opposant Monsieur [M] et la société NBB Lease France 1 compte tenu du caractère interdépendant du contrat de location financière et du contrat de prestations informatiques.

Par suite, il convient en application de l’article 88 susvisé d’évoquer le litige opposant ces deux parties.

III. Sur la recevabilité des prétentions nouvelles formées par M. [M] contre la société NBB Lease France 1

La demande de M. [M] tendant à la caducité du contrat de location financière formée pour la première fois en cause d’appel, tend aux mêmes fins que sa demande de résolution présentée en première instance, à savoir l’extinction du contrat, de sorte qu’elle est recevable en application de l’article 565 du code de procédure civile.

La demande de M. [M] de restitution des loyers, formée pour la première fois en cause d’appel à l’encontre de la société NBB Lease France 1, est la conséquence de la demande de caducité du contrat, et est donc recevable à ce titre.

Les fins de non-recevoir soulevées par la société NBB Lease France 1 sont donc rejetées.

IV. Sur la résolution du contrat conclu entre M. [M] et la SASU One bureautique

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 2224 du code civil indique: ‘La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.’

L’article 1226 du code civil énonce: ‘Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.

La mise en demeure mentionne expressément qu’à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Lorsque l’inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l’inexécution.’

L’article 1228 ajoute: ‘Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.’

M. [M] a notifié la résolution du contrat à la SASU One bureautique par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mai 2021 réceptionnée le 7 juin 2021, après une mise en demeure du 14 février 2020, pour deux motifs, à savoir l’absence de légende sous les photographies du site internet et l’inefficacité de celui-ci du fait d’un manque de référencement.

Devant la cour, il maintient ces griefs tout en invoquant d’autres manquements tenant au non-respect du délai de mise en service du site internet, à l’absence de préparation graphique correspondant à l’image du client, à un mauvais agencement des éléments et à une absence d’assistance, de sauvegarde et de propriété du nom de domaine sani-services.fr.

Il incombe à M. [M], qui sollicite le constat de la résolution du contrat, de prouver que l’autre partie n’a pas exécuté son obligation contractuelle et que cette inexécution est grave.

Aux termes du contrat, la SASU One bureautique s’est notamment engagée à créer un site internet et à fournir une prestation de référencement naturel régional.

Il est constant que le site a été livré et mis en ligne en juin 2019.

Le référencement naturel est l’une des stratégies pour être référencé sur internet. Il mobilise un ensemble de techniques visant à positionner les pages d’un site web en haut des résultats de recherche sur les moteurs de recherches. Son intérêt est d’améliorer la visibilité du site internet.

Pour établir la défaillance de la SASU One bureautique à ce titre, M. [M] produit notamment:

– un procès-verbal de constat de huissier établi le 8 avril 2021 qui montre que certaines photos présentes sur le site créé pour Sani services ne présentent pas d’intitulé, ce qui n’est pas de nature à faciliter le bon référencement du site ;

– des résultats de recherche Google avec des mots-clés tels que ‘toilette location [Localité 6]’ qui ne positionnent pas favorablement le site Sani-services.fr (n’apparaît pas en première page);

– un document qui compare le nombre de visites sur l’année 2020 entre le site créé par One bureautique et l’ancien site Saniservices.pro mis en place par la société Jalis et qui met en évidence 1156 visites pour le premier contre 3756 visites en moyenne pour le second.

Il ressort de ces éléments une fréquentation du site créé par la SASU One bureautique nettement inférieure à celle de l’ancien site internet Jalis et donc une forte baisse de la visibilité de l’entreprise de M. [M] sur le moteur de recherche.

La société One bureautique n’a pas amélioré le référencement naturel du site Sani-services qui s’est même révélé moins efficace.

Le fait pour M. [M] de ne pas avoir opté pour un référencement payant, basé sur une campagne publicitaire, n’est pas de nature à exonérer la société One bureautique de son obligation de rendre l’entreprise visible de façon naturelle grâce à un travail de construction approfondi et notamment à un choix de mots-clés pertinent.

L’inexécution contractuelle de la prestataire est ainsi démontrée. Elle a persisté malgré la mise en demeure. Elle présente un caractère suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs allégués.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a constaté la résolution du contrat litigieux.

V. Sur la caducité du contrat de location financière

En application de l’article1186 du code civil précité, les contrats litigieux étant interdépendants, il en résulte que l’exécution de chacun de ces contrats est une condition déterminante du consentement des parties, de sorte que, lorsque l’un d’eux disparaît, les autres contrats sont caducs si le contractant contre lequel cette caducité est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’il a donné son consentement.

En l’espèce, la société NBB Lease France 1 avait manifestement connaissance de l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’elle avait donné son consentement puisque le contrat conclu avec la société One bureautique (maintenance, création de site internet, référencement naturel, fourniture de matériel) était inclus dans une opération qui comportait une location financière, que les deux conventions étaient concomitantes, de même durée et comprenaient le même montant de loyer et de périodicité, que la société NBB Lease France 1 prélevait les loyers (540 euros par trimestre) sur le compte de M. [M] pour ensuite régler la société One bureautique de ses prestations et qu’enfin, selon les conditions générales, le loueur devait être informé de toute difficulté résultant de l’exécution du contrat avec le fournisseur (pièces n°18, 25, 26 et 27 de M. [M]).

Au vu de ces éléments, il convient de prononcer la caducité du contrat de location financière conclu avec la société NBB Lease France 1.

VI. Sur les restitutions et les dommages et intérêts

L’article 1209 du code civil dispose :

‘La résolution met fin au contrat.

La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice.

Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.’

L’article 1187 du même code prévoit : ‘La caducité met fin au contrat.

Elle peut donner lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.’

L’article 1352 du même code énonce : ‘La restitution d’une chose autre que d’une somme d’argent a lieu en nature ou, lorsque cela est impossible, en valeur, estimée au jour de la restitution.’

En l’espèce, la résolution unilatérale du contrat de prestations informatiques, et par voie de conséquence la caducité du contrat de location financière, ont pris effet à compter du 7 juin 2021, date de la réception par la SASU One bureautique de la notification faite par M. [M].

M. [M] est donc bien fondé à réclamer aux cocontractantes le remboursement des loyers qu’il a réglés à compter de cette date jusqu’au 26 décembre 2022 (cf sa pièce n°27), soit au total la somme de (540 euros x 7 trimestres) = 3.780 euros.

La SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 sont condamnées in solidum au paiement de cette somme.

En revanche, il convient de le débouter de sa demande de restitution des loyers pour la période antérieure au 7 juin 2021 puisqu’au cours de celle-ci, il a pu utiliser le PC portable et bénéficier du site internet créé par la SASU One bureautique malgré la mauvaise exécution du référencement naturel de sorte que les prestations échangées n’étaient pas dépourvues d’utilité.

Il convient par ailleurs d’ordonner à M. [M] de restituer à la société NBB Lease France 1 le matériel loué sans qu’il soit besoin d’assortir cette condamnation d’une astreinte.

Il n’y pas lieu non plus de faire droit à la demande de la société NBB Lease France 1 tendant à être autorisée à appréhender le matériel en quelque lieu qu’il se trouve.

Dans son courrier de résiliation du 17 mai 2021, adressé en copie à la société NBB Lease France 1, M. [M] indiquait qu’il se tenait à disposition pour restituer le PC portable Lenovo.

La société NBB Lease France 1, qui répondait le 10 juin suivant qu’elle était propriétaire du matériel et qu’elle se rapprochait du fournisseur One bureautique, n’ayant pris aucune disposition pour récupérer le PC, est mal fondée à solliciter une indemnité de jouissance du matériel équivalente aux loyers restitués. Elle est donc déboutée de cette demande.

Sur la demande de M. [M] visant à la communication des informations nécessaires à la restitution et l’exploitation du nom de domaine sani-services.fr, il convient d’observer que le contrat passé avec la société One bureautique stipule expressément que le client devient propriétaire du tout (nom du domaine, adresse mail…) à la fin du contrat, cette précision étant rappelée une seconde fois, soulignée en rouge, au chapitre 4.1 de la proposition commerciale signée par M. [M] (cf sa pièce n°1).

Il en résulte que la société One bureautique demeure propriétaire du nom du site pendant toute la durée de du contrat, aucun manquement ne pouvant lui être reproché à cet égard.

M. [M] ayant résilié le contrat unilatéralement avant son terme, n’est pas fondé à obtenir les codes nécessaires à la restitution du domaine.

Sa demande présentée de ce chef est donc rejetée.

Le tribunal a exactement retenu que M.[M] avait incontestablement subi un préjudice en lien avec le manquement contractuel de la société One bureautique du fait de la perte de fréquentation sur son nouveau site.

En revanche, au vu de ce qui a été dit plus haut, M. [M] ne peut pas se plaindre de ce que le site n’est plus fonctionnel depuis le 16 mai 2023.

Sur la base de ces observations, la société One bureautique est condamnée à payer à M. [M] une indemnité de 3.000 euros en réparation de son préjudice, le jugement étant confirmé sur ce point.

VII. Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles, justement appréciées, sont confirmées.

La SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 succombant, sont condamnées in solidum aux dépens de l’appel, à payer à M. [M] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel, et sont déboutées de leur demande formée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris concernant le litige opposant M. [R] [M] à la société NBB Lease France I et a renvoyé l’affaire les opposant devant ladite juridiction et sauf en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande en paiement de la somme de 2772,28 euros par la société One bureautique au titre du contrat résolu ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

DEBOUTE la SASU One bureautique de sa demande d’annulation du jugement ;

REJETTE l’exception d’incompétence soulevée au profit du tribunal de commerce de Paris concernant le litige opposant M. [M] et la société NBB Lease France 1 ;

EVOQUE le litige opposant M. [M] et la société NBB Lease France 1 ;

REJETTE les fins de non-recevoir soulevées par la société NBB Lease France 1 ;

PRONONCE la caducité du contrat liant M. [M] et la société NBB Lease France 1 à la date du 7 juin 2021 ;

CONDAMNE in solidum la SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 à payer la somme de 3.780 euros à M. [R] [M] à titre de restitution des loyers ;

ORDONNE à M. [R] [M] de restituer à la société NBB Lease France 1 le PC portable Lenovo, objet du contrat de location ;

CONDAMNE in solidum la SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 à payer à M. [R] [M] la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 de leur demande formée à ce titre ;

CONDAMNE in solidum la SASU One bureautique et la société NBB Lease France 1 aux dépens de l’appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL F. EMILY